L’auteur s’embarque avec les aventuriers. Leurs entreprises.

À travers Chicago, 1er au 14 novembre 2013

 

Vendredi 1er novembre 2013

Aymeric Avice qui arrive de Paris rejoint Benjamin Sanz qui arrive de Kansas City près d’une bretelle d’autoroutes, comme dans un film d’espionnage. Destination Pinsel, le quartier mexicain. C’est le jour des morts à Dvorak Park (1119 W. Cullerton St.). Dia de los Muertos disent et dansent des squelettes emplumés, des squelettes aux joues vertes qui singent les âmes errantes. Après avoir vagabondé dans l’éther nocturne de la rue, l’insolite procession se replie dans un auditorium qui fait gymnase et qui fait temple, pour boire du chocolat chaud et regarder des danseurs de hip-hop en chair et en os. Un autel porte le nom : « The Spirit of Rasan Adabravi ». Cela devait être le nom du groupe à venir, le quintette d’Avice et de Sanz avec Jason Adasiewicz, Joshua Abrams et Avreeayl Ra.

Samedi 2 novembre 2013

Tout commence dans le South Side, dans le quartier des Dorchester Projects. L’artiste contemporain Theaster Gates (qui conçoit nombre de ses « installations » grandeur nature ou culture, à même la vie sociale) et son équipe de la Rebuild Foundation y ont restauré et rouvert plusieurs maisons de vie, du peuple, accessibles à tous et donnant accès à tout. Il y a côte à côte la « Listening House » (6918 S. Dorchester Ave.) et l’« Archive House » (6916 S. Dorchester Ave.), où des centaines de disques en vinyle et des centaines de livres en papier attendent d’être sondés, où les community members peuvent entrer et sortir comme dans un moulin. Et il y a de l’autre côté de la rue la « Black Cinema House » (6901 S. Dorchester Ave.) où sont organisées des projections de films documentaire et de fiction, quelquefois avec de la musique en vrai quand le film paraît muet, dans le cadre de l’Experimental Sound Series. Avice et Sanz s’exécutent à brûle-pourpoint sur « La Sirène des tropiques », réalisé en 1927 par Henri Étiévant et Mario Nalpas (Luis Buñuel, assistant), dans lequel une désarmante Joséphine Baker surfait, contrefait et déjoue (« signifyin’ ») les poncifs du colonialisme, de l’exotisme et du sexisme. Papitou la sirène peut bien avoir « deux grands amis : le soleil et la liberté », elle éclate d’une vie insaisissable. Le trompettiste et le batteur ne rythment pas l’action, son activité solaire et libre, ils en accusent réception, la répercutent, la diffractent. Ils offrent comme des panneaux musicaux pour suggérer d’autres durées, implicites, d’autres prolongements aux séquences. Un découpage en décalcomanie. Le second set est strictement musical avec le renfort de Mwata Bowden au saxophone baryton et à la clarinette et de David Boykin au saxophone soprano et à la batterie. Après une joute de rythmes concassés, Sanz se charge de la persistance et Boykin des accents et des accidents. Croissances et excroissances des instruments à vent. Une question se pose alors : peut-on se rencontrer pour la première fois dans de telles effusions ? Oui.

Dimanche 3 novembre 2013

Séance privée à la Black Cinema House pour s’absorber dans « Regard/Play », le court métrage qui se rembobine dans le temps de Jesse Atlas. Escapade au Soccer Club Club de Drag City (2923 N. Cicero Ave.) pour assister à la clôture de l’exposition de Lisa Alvarado en présence des groupes Natural Information Society et Bitchin Bajas séparés par les bannières et les tentures de l’artiste. Escapade à Constellation (3111 N. Western Ave.) pour écouter Karl Larson s’envaser dans Triadic Memories, composition pour piano qui s’évase de Morton Feldman. Escapade au Hungry Brain (2319 W. Belmont Ave.) pour écouter le nouveau quartette de saxophones ravinés de Ken Vandermark, Dave Rempis, Mars Williams et Nick Mazzarella. Rideau.

Lundi 4 novembre 2013

Premier jour du quintette d’Avice et de Sanz avec Adasiewicz, Abrams et Ra, et d’abord une après-midi de palabres au Franke Institute for the Humanities (1212 E. 57th St.), à l’Université de Chicago, où le philosophe Arnold Davidson compte bien les faire parler sur le thème « improvisation et répétition » qui décline l’ambition affichée par le groupe d’examiner les rapports possibles entre jazz et « musiques de transe ». Car si l’improvisation est censée répondre à un impératif d’étonnement et de renouvellement, et si la répétition est censée répondre à un impératif d’assiduité et de médusement, qu’en est-t-il de leur rapprochement ? Quel magnétisme leur serait commun ? Tout le monde répond, mais Ra prêche, ne parle que d’épanouissement. Pour agir, pour jouer, il faut lâcher prise, laisser là la rationalité, et l’identité. Et reprendre confiance. Comment avons-nous cessé d’avoir réellement confiance les uns dans les autres ? Sinon, l’affaire est entendue. On sait bien qu’un instrument ne représente jamais qu’une voie praticable. Que l’aisance s’acquiert en s’entraînant. Que tout repose sur des réglages et des ajustements permanents. Mais s’épanouir… Savoir que la créativité vient du goût pour la différence, du goût de la différence, et qu’elle n’obéit qu’à la loi du changement. Davidson a d’ailleurs écrit : « Opportunities for open-ended modification of the known is a good motto for this êthos of improvisation. ». Ra conclut : notre musique a déjà commencé, au cours de cet échange, les concerts n’en seront que la continuation, sous d’autres formes. Rendez-vous à la case 7 novembre. Pour l’instant il fait nuit et c’est dans le studio ou hangar de la station de radio WNUR (1877 Campus Dr., à Evanston), pour l’émission « Killin’ the Vibe », qu’Avice et Sanz papillonnent, tintinnabulent, et lancent leurs fusées. Puis devisent sur les villes, les écoles de magie et de sorcellerie.

 

Mardi 5 novembre 2013

Retour dans le quartier des Dorchester Projects où, par l’entremise de la Rebuild Foundation, Avice et Sanz vont à la rencontre des élèves de la South Shore Fine Arts School (1415 E. 70th St.) pour les faire finalement travailler sur la musique du film d’horreur qu’ils bricolent : vrac de voix et de cris dans le noir, crissements sur toutes les surfaces, chuintements et stridulations, crampes et convulsions, tout est prétexte à l’effroi et au rire. On ne s’interdit rien, pas même de jammer sur Twinkle Twinkle Little Star, et d’éprouver par soi-même le bonheur de passer constamment d’une chose à une autre, de la débandade au resserrement. Improvisation et répétition, le programme est rempli. Plus tard, dans le velouté de bois de la salle à manger de l’Archive House, on sert la soupe communautaire aux enfants et à leurs familles, pendant que le trompettiste et le batteur jouent de bon cœur, s’en donnent à cœur joie. Ils jouent « à la maison » (l’esprit de John Coltrane plane dans la pièce), rebondissent sur leurs instruments, au sol, au plafond et sur les murs, sur les lèvres et sur les corps, accueille tout ce qui arrive et dérive. Dans un monde parfait, ne serait-ce pas le genre d’endroits et de circonstances pour que la musique soit ? Changement d’ambiance au Whistler (2421 N. Milwaukee Ave.), bruyant bar à cocktails servis dans des modèles réduits de statues de l’île de Pâques, où Avice et Sanz pactisent de nouveau avec Mwata Bowden et, aux contrebasses, Harrison Bankhead et Jason Roebke. Ensemble, ils épousent le balancement majestueux des choses, parfois strié de rugissements, jusqu’à la plate-forme aérienne d’une volupté.

 

Mercredi 6 novembre 2013

Les uns après les autres, Ari Brown (saxophones ténor et soprano), Fred Jackson (saxophone alto), Jason Stein (clarinette basse), Marquis Hill (trompette) et Roebke se présentent au DuSable Museum of African American History (740 E. 56th Pl.). Musée vide qui fait masse. Dans les loges, en attendant, Brown réexplique à Stein les modes pentatoniques et le concept chromatique lydien d’organisation tonale de George Russell. Des histoires à rêver debout. Le moment venu, en fin d’après-midi, dans le bleu nuit d’une salle tapissée d’étoiles, l’effet d’entraînement est immédiat : tandis que Sanz se repaît, et que Roebke ruse, l’improvisation collective progresse à travers de grandes flanquées de voix qui s’attachent les unes aux autres (celle d’Ari Brown serrant un nœud coulant autour de l’un de ses solos), fait jouer avec une déconcertante facilité les ressorts du contrepoint ou de la polyphonie, et de jonction en jonction, accomplit les fluctuations.

 

Jeudi 7 novembre 2013

Second jour du quintette d’Avice et de Sanz avec Adasiewicz, Abrams et Ra, et première à l’Umbrella Music Festival Chicago, habitué à recevoir chaque année, sous les lustres et les coupoles du Chicago Cultural Center (78 E. Washington St.), des escadres d’improvisateurs européens de toutes les générations : « European Jazz meets Chicago ». Watershed, avec Denis Fournier, Bernard Santacruz, Hanah John Taylor, Nicole Mitchell et Tomeka Reid, avait partagé cette scène un an plus tôt, jour pour jour, de même que le East-West Collective de Didier Petit, Sylvain Kassap, Larry Ochs, Miya Masaoka et Xu Feng-Xia en juin 2013. Et on y avait organisé, le 26 avril 2013, le concert de lancement de The Bridge avec Fred Jackson, Stéphane Payen, Edward Perraud et Frank Rosaly. Après quelques instants d’hésitation sur le seuil de ce qui va suivre, le quintette s’engage sur les terres du martèlement et il fait d’abord bon s’acharner dans le monde ainsi créé. Mais qu’advient-il quand une figure ou un ensemble de figures avérées, leur charpente manifeste, ont passé par suffisamment d’états, ont subi suffisamment de torsions ? L’improvisation devient-elle répétitive ? Il faudrait décamper, trouver d’autres points d’appui, une issue, la parade ou le silence. Trop de girouettes de rythmes. Malgré les efforts de certains, le quintette s’enfonce dans la nuit de plus en plus noire des variations et dépasse la limite de temps.

 

Vendredi 8 novembre 2013

Le quintette sans Adasiewicz mène la ronde immobile dans la classe du contrebassiste Scott Mason, directeur du département « Jazz & Contemporary Music Studies » de la Roosevelt University (430 S. Michigan Ave), dans un building boursouflé du centre-ville. Tout au fond du couloir ou du boyau, Avice aux cornes, Abrams aux égrènements, Ra aux affleurements, Sanz à la kalimba soulèvent délicatement la peau des rythmes. Naissance de l’ivresse. Les esprits sont calmés. Ra reprend la parole : la ville de Chicago est unique grâce aux possibilités qu’elle offre, parce que la musique peut encore se vivre comme une « social thing ». Partout les conservatoires se substituent à l’environnement, alors que l’environnement est la véritable école. N’attendez pas. Jouez. Jouez à tout bout de champ. Allez au bout de vos pensées et dépassez-les, atteignez des régions au-delà de la logique, là où l’intuition se révèle plus utile que l’intention. Ce que fera très exactement dans la soirée, à Constellation, le musculeux trio Tarbaby (Orrin Evans, Eric Revis, Nasheet Waits), en décapant l’aluminium du jazz.

Samedi 9 novembre 2013

Relâche. Rapide réception à la Listening House, avec Robert Irving III, Douglas R. Ewart, Khari B., Lou Malozzi, and the likes. À Constellation, Amina Claudine Myers lave à grande eau gospel l’histoire de la musique, passée, présente, et future.

 

Dimanche 10 novembre 2013

Troisième jour du quintette d’Avice et de Sanz avec Adasiewicz, Abrams et Ra. Sur la highway qui nous mène vers Milwaukee et le Woodland Pattern Bookcenter (720 E. Locust St.), librairie indépendante et centre culturel, on fait voiture à part pour que tiennent tous les instruments. On parle décidément peu des visées initiales, d’une ambigüe absence de direction (de vision ? de confiance ?). Tout a peut-être été dit, communiqué, indirectement, par Ra qui ne se formalise de rien : l’intuition et l’intention s’embrouillent dans l’esprit trop caméléon de Rasan Adabravi. Tout est joué ou doit se jouer. Sur place, il manque de quoi faire une seconde batterie complète : Sanz s’improvise timbaliste, tandis que Ra coupe toutes les cordes d’amarrage et crible leurs interactions. Nouvel assaut. La pression est constante. On ne recule pas devant la musique. Si rapprochement il y peut y avoir avec ce que l’on prend pour des phénomènes de « transe », celui-ci sera frontal et frictionnel. C’est un vrai guêpier et un vrai bonheur qui recommencent au second set (la seconde batterie ayant été complétée) : Ra fait le boutefeu, sous bonne escorte de Sanz. La contrebasse d’Abrams est un flambeau et on peut lire dans ses ficelles de fumée les lignes et les traits de ce tir de barrage. Giboulées de vibraphone grâce à Adasiewicz, imbattable. Embusqué, Avice regarde dans les yeux de ce cyclone, alpague parfois et peste dans sa trompette et/ou dans son bugle. Nouvel assaut, et cette fois-ci, ça passe. C’est que le temps ne s’écoule pas à la même vitesse à l’intérieur ou à l’extérieur d’une musique pareille. D’ailleurs, les rues de Milwaukee sont désertes à présent.

 

Lundi 11 novembre 2013

Après une visite de la maison montgolfière, plissée de merveilles, de la peintre Gina Litherland et du polytechnicien Hal Rammel, organisateur des sessions « Alternating Current Live » au Woodland Pattern Bookcenter, et après plusieurs faux départs pour récupérer les cailloux semés en chemin par Sanz, retour à Chicago entre les faucons de neige, jusqu’au Recital Hall de la DePaul University (804 W. Belden Ave.). Le quintette sans Adasiewicz s’insère dans un programme en plusieurs temps échafaudé par le batteur Dana Hall, directeur de l’école de musique : « Combos ». D’abord Avice, Abrams, Ra et Sanz sonnent la charge de leur quartette (à l’essai : trouvailles et retrouvailles de rythmes, obtus), et répondent ensuite aux questions des étudiants (La logique dans tout ça ? La musique improvisée est une construction en feuilleté, avec un sens ouvert du temps qui ne correspond pas à la division métrique, aux divisions, explique patiemment Abrams – et Ra, toujours galvanisé, repart sur la confiance, l’intuition, l’imagination, le champ de forces ou le flux d’énergies, de communication émotionnelle et spirituelle qui déconnecte la raison : « You have to turn that off ! »). Puis les étudiants se produisent devant le quartette dans plusieurs sous-ensembles studieux auxquels se rajoutent Ra sur Simone de Frank Foster, Avice et Sanz sur Forth Worth de Joe Lovano. Pour celles et ceux qui en auraient encore douté, preuve est faite que ces improvisateurs « libres » connaissent le « répertoire ». Savent de quoi ils parlent. Suivant. Hall, le « professeur », dans un état de fureur poétique, déchiquète sa batterie à baldaquin avec sa propre formation, Polyglot, dont Abrams est membre, avec le trompettiste Russ Johnson et le saxophoniste alto Nick Mazzarella. Enfin, le quartette récapitule, avec un invité spécial : Fred Jackson, encore étudiant à DePaul, capable d’entendre les appels secrètement lancés, par Avice notamment, d’identifier ce qui coule de source, s’enroule et se désenroule parmi tant d’abondances. Ra : « When it’s right, it’s a spontaneous composition, not just playing. ». Vers minuit, à l’étage belvédère, très « Rosemary’s Baby », de Beat Kitchen (2100 W. Belmont Ave.), le groupe Extraordinary Popular Delusions (Mars Williams aux saxophones, Jim Baker aux claviers, Brian Sandstrom aux instruments à cordes, Steve Hunt aux instruments à percussion : il y en a des dizaines pour les quatre hommes, l’ancienne équipe du NRG Ensemble d’Hal Russell, et leurs invités surprise : Avice et Sanz au diapason de la ferveur – mais aucun public) se déchaînent comme chaque lundi soir depuis une éternité, et ratatinent tout ce qui ne bouge pas. Ces rencontres, ces à-côtés, auront peut-être été, pour Avice et pour Sanz, les plus concluants. Cela fait partie de l’aventure.

Mardi 12 novembre 2013

Le Whistler est toujours aussi bruyant, mais les musiciens sont en nombre dans le contre-courant : Avice, Sanz, Stein, Dave Rempis aux saxophones, Fred Lonberg-Holm au violoncelle, Michael Zerang à la batterie ont immédiatement lâché la bride. On sait donc que la musique improvisée peut proposer une structuration par l’énergie dégagée. Auquel cas, le déchaînement est-il un enchaînement à la puissance, aux puissances (du jeu) que l’on invoque ? Les batteurs, une fois Sanz dessanglé de ses rythmes et branché sur Zerang et son trapèze de cymbales, de caisse claire et crantée, dévient les flux, tels des safrans. Des mélodies s’échappent tantôt, comme des objets trouvés ou des poches d’air. Comme des estafilades.

 

Mercredi 13 novembre 2013

Le quintette sans Adasiewicz s’attarde dans les salons luxurieux de l’Alliance Française (54 W. Chicago), avant la projection de « L’Âge d’or », réalisé en 1930 par Luis Buñuel (Salvador Dali, co-scénariste). On procède, et le choix est on ne peut plus judicieux face à un tel film, à l’inverse de la séance à la « Black Cinema House » : aussi peu d’interventions qu’il est permis, et les moins fracassantes de préférence ; les musiciens, des deux côtés de l’écran, semblent même se tenir à l’écart, et rapetisser, se rembrunir devant la virulence, la cruauté, l’amoralité apparente de l’œuvre et son ode à l’amour libre et fou, ses doses mortelles d’humour noir. Ils ne la transforment pas en « spectacle ». Avice mâche ses sons. Sanz foule ses surfaces. Ra, cotonneux, chiffonne ses peaux et ses métaux. Abrams (par ailleurs compositeur de musiques de films, celle du documentaire « The Interrupters » de Steve James et Alex Kotlowitz par exemple) est languide presque. L’improvisation est à sec comme une rivière l’été. Ils jouent superbement le nec le moins ultra. Et se séparent.

 

Jeudi 14 novembre 2013

C’est bientôt fini (quoiqu’Avice et Sanz aient encore à faire l’expérience, dans les jours qui suivent, de la moiteur de Houston, Texas, et de ses alligators). David Boykin (clarinette), Katie Young (basson), Keefe Jackson (saxophone ténor), Fred Lonberg-Holm (pédales d’effet – faute d’une guitare en état de marche) et Matt Lux (basse électrique) sont encore là, au Comfort Station (2579 N. Milwaukee Ave.), maisonnette plantée au centre de Logan Square, qui servit d’abri pour les conducteurs de tramways de la ville au début du siècle dernier avant d’être reconvertie il y a quelques années en lieu à-tout-faire artistiquement. Quelques bancs en bois, quelques lampes de chevet, le bruit de la circulation alentour. Et beaucoup de sombreurs assemblés ce soir (au basson, au ténor, à la basse, aux interférences) pour draguer le canal de la musique. La tisonner aussi. La pensée va bel et bien à différentes vitesses, incarnée(s) par différents musiciens. Un golem se redresse possiblement. Il y a la pointe d’un éclaircissement. C’est la clarinette de David Boykin.

Alexandre Pierrepont